Morceau d’architecture « Le temple intérieur de l’homme » -
Morceau d’architecture « Le temple intérieur de l’homme »
Tout d’abord, qu’est-ce que le Temple extérieur de l’Homme ?
Le Temple extérieur est le monde dans lequel l’homme évolue au moyen de son corps. La présence humaine se situe sur l’axe espace/temps. Le corps éphémère, limité dans sa durée, inscrit sa présence dans le monde en agissant sur son environnement. Ceci implique la mise en mouvement d’un dynamisme évolutif et stimulant. L’incarnation plonge l’homme au cœur de l’action. Le corps, source de connaissance immédiate et imparfaite, est limité par ses sens mais il n’en demeure pas moins l’outil de contact par excellence avec l’espace tangible de la matière et des formes de vie qui l’habitent. L’impact des expériences le heurte, résonne en lui et lui infuse des d’énergies qu’il transforme.
Mais en parallèle, dans le déroulement d’un processus intimiste, l’âme dotée d’un corps, va en priorité se construire, développer son égo, qui est le fondement nécessaire à l’épanouissement de sa vie dans le monde. Ainsi, l’enfant, va collecter les idées et les préjugés délivrés par son entourage avec l’éducation, le contexte familial, social, religieux et tous les autres prêts à penser qui lui seront donnés. Il avalera tout : émotions, raz-le bol, traumatismes. Il sera la résultante de la digestion, bonne ou mauvaise, de tous ces ingrédients internes et externes. L’alchimie est en marche, mais…
Quelle est donc cette fausse note qui trouble sa vie et lui donne cette pénible sensation d’insatisfaction, qu’est-ce qui l’emmène sur des voies dangereuses à l’issue incertaine ? Qu’est ce qui le taraude et lui fait tout détruire sans discernement ? Qu’est ce qui réveille sa colère, sa rage ou sa conscience ? … Son impuissance à répondre à une petite voix, qui lui souffle «la vie ce n’est pas que ça».
C’est quoi alors ?
Beaucoup n’y apporteront aucune réponse. D’autres, seront las de chercher et deviendront amers et insatisfaits. Et enfin, quelques-uns vont engager une lente introspection «Visita Interiora Terrae, Rectificandoque, Invenies, Occultum Lapidem», Le principe du Temple intérieur est posé.
Le Temple intérieur de l’homme est régi par la loi des 3 grands plans : physique, astral et mental. C’est là, dans le développement et les interactions de ces niveaux complexes, que tout se joue. Les Parques ont tissé leurs fils, reste à dénouer l’écheveau.
Le plan physique, c’est celui que nous savons tous identifier, véhicule efficace pour explorer la matière. Derrière l’apparence, il cache un autre corps plus subtil. Le corps éthérique. On peut le comparer à un baromètre ou un réflecteur indiquant notre état de santé physique, psychique et spirituel. La Théosophie le considère comme un plan à part entière, le plan des forces qui maintiennent les activités de la vie dans les formes et permettent à celles-ci de se mouvoir et de se reproduire. Sa perception n’est pas donnée à tous, seuls certains clairvoyants ont développé cette capacité.
Que voient-ils au juste, des centres de force appelés chakras. Ce mot sanskrit signifie roue ou disque en rotation, qui se manifestent par des petites dépressions en forme de soucoupes, constituées de matière tournant rapidement. Ces forces coulent à travers les chakras et animent la vie du corps éthérique. Le développement des chakras varie considérablement d’un individu à l’autre. Leur taille peut varier de 5 centimètres à 15 centimètres de diamètre.
Au nombre de sept, ces chakras se répartissent de la base de notre colonne vertébrale, jusqu’au sommet de la tête. Si selon les écoles y a des divergences sur leurs couleurs, tous s’accordent sur 3 points, les chakras :
- tournent,
- produisent de l’énergie,
- relèvent à la fois du corps physique et du corps éthérique.
Les chakras appartiennent à un système énergétique complexe mais organisé. Deux formes d’énergies transitent à travers eux :
- les énergies cosmiques qui se propagent sous la forme d’un courant qui effectue un trajet de haut en bas,
- les énergies magnétiques ou telluriques qui elles suivent le mouvement inverse de bas en haut.
De nature électrique, l’énergie venant du ciel se matérialise en ralentissant son rythme vibratoire. A l’inverse le courant venant de la terre accélère son rythme vibratoire et tend progressivement vers une dématérialisation, il se spiritualise.
Ce courant électrique qui monte et descend, engendre perpendiculairement à lui, un champ magnétique qui encercle le corps. En fonction de sa force, il génère une succession de champs magnétiques d’intensités différentes, nommée aura.
Le corps astral joue aussi un rôle très important, il exprime le plan du désir. Ses contours suivent le corps physique. Il est entouré d’une aura aux couleurs éclatantes avec des variations colorées qui résultent des états d’âme.
Le corps astral fonctionne comme un pont entre le cerveau physique et le mental. Ses perturbations affectent notre corps physique et engendrent des troubles fonctionnels et organiques. Le désir a souvent des excès, il devient alors passion et même passion excessive que le mental ne peut plus maîtriser. Dans l’Éloge de la Folie, Érasme écrivait : «Toute la différence qu’il y a entre un fou et un sage, c’est que le premier obéit à ses passions et le second à la raison».
Et oui, la raison ! Avec elle nous arrivons dans le domaine du corps mental, véhicule de l’intellect, de la mémoire et de l’imagination. L’aspect le plus dense de ce plan contient nos pensées les plus matérielles, celles qui appartiennent au monde ordinaire. Les couches les plus fines sont utilisées par le Soi pour véhiculer les archétypes les plus élevés et impulser une créativité dans la vie.
Pour résumer on peut dire que la structure de l’homme est ternaire avec 3 corps principaux : physique, astral et mental. Chacun d’eux est doté de ses propres corps subtils et chaque corps subtil se distingue des autres par la qualité de la substance dont il est fait. Il a un niveau vibratoire, un niveau d’énergie, un niveau de conscience.
Les qualités de ces niveaux déterminent le degré de matérialité et de spiritualité de l’homme.
Pour comprendre l’être humain, il convient d’avoir la vision claire des instruments temporaires dont il dispose. Cet état des lieux permet une exploration plus pertinente de notre Temple intérieur. A. E. Powel écrivait à ce propos «Il nous faut prendre position en dehors de l’homme lui-même, observer d’en haut les véhicules de sa personnalité et les considérer comme des instruments temporaires, façonnés pour l’usage de l’homme et mis de côté comme on met de côté un outil brisé, quand ils ont servi leur dessein».
À travers les âges et les civilisations de nombreuses Philosophies ou sciences sacrées se sont attachées à cette observation, tout en s’efforçant de mettre en avant les analogies et les relations entre l’homme et le Divin. Un Divin, qui suivant les Écoles, peut être vu sous plusieurs angles : soit comme extérieur et transcendant, soit comment intérieur et immanent, soit comme extérieur et intérieur englobant le Tout. «Tout est en Tout et Tout est dans le tout».
Le Temple, qu’il soit matériel ou spirituel est un centre d’activation, le lien entre le Divin et l’humain, fondé sur le principe des trois plans.
1°) – Le temple dans sa première partie est précédé en général d’une plate-forme à laquelle on accède par trois marches. Cette plate-forme à ciel ouvert prend le nom de Pronaos pour les Temples antiques et de Parvis pour les édifices chrétiens. Si le Parvis est abrité, il s’appelle Narthex.
Cette partie du Temple correspond symboliquement au plan de la matière, ainsi qu’aux éléments Terre et Eau. Dans la morphologie de l’Homme, elle est assimilée à l’abdomen.
2°) – Dans sa deuxième partie après le Pronaos, qui fait office de sas, on pénètre dans le Temple proprement dit. On y découvre une grande chambre proposant dans sa décoration un certain nombre de symboles. C’est le Naos ou dans les Temples chrétiens, Nef ou Vaisseau.
Cet espace du Temple est relié au deuxième plan, ainsi qu’aux éléments Air et Feu. Bien qu’ouvert à tout le monde, le Naos peut être utilisé dans certaines conditions, comme lieu d’enseignement. Les jours de fêtes, les prêtres y montraient la statue de la divinité. Le Naos est assimilé au thorax de l’homme.
3°) – Faisant suite au Naos et protégée de la vue, une salle plus petite apparaît. Sa destination est cette fois-ci nettement initiatique. Il s’agit du Saint des Saints. Dans les Temples chrétiens, il se nomme le Chœur. Celui-ci peut être séparé des fidèles par une clôture appelée Jubé.
Cette troisième partie du Temple correspond au troisième plan, celui de l’Esprit et de la Conscience Divine. Ce lieu consacré accueille l’adepte, qui sous la direction du Maître, entreprend son voyage initiatique. Chez l’Homme le Saint des Saints correspond à la tête.
Par analogie le Saint des Saints est la partie spirituelle du Temple Intérieur de l’Homme, le lieu où s’effectue la rencontre avec la Transcendance, avec le Divin. Il est le réceptacle de la lumière Divine. Mais avant de découvrir cette lumière qui brille en lui, l’être humain doit partir à sa propre conquête. Ce faisant, il accomplit l’acte le plus décisif de sa destinée, il répond à l’appel du «Connais-toi toi-même»… prendre conscience de son désert, avoir une vision de sa misère et de sa grandeur.
Le candidat à l’initiation peut choisir de s’extraire du monde, véritable obstacle à la réflexion qui empêche la spéculation de l’absolu en lui. Se retirer dans le désert, lieu d’un temps sacro-saint, où s’accomplit l’expérience religieuse ou mystique, où s’abolit la différence du saint et du sacré ; s’élever à la transcendance ; se quitter soi-même, abandonner son moi superficiel pour trouver son Soi…
Le désert conduit à une deuxième naissance, celle de toutes les terres promises, où le pèlerin se meut au contact de l’infini et s’immerge dans l’alliance de la terre et du ciel. Il plonge au cœur de la contemplation, «theôria» pour connaître des faits que l’on ne voit pas, pour trouver une condition humaine autre. Cette relation alchimique au minéral féconde la métamorphose de l’ermite en pèlerin. «La grâce flue de la fontaine divine, elle est une ressemblance divine, elle a la saveur de Dieu et rend l’âme semblable à Dieu » ; écrivait Maître Eckhart.
Descente et remontée, dans l’alliance de la terre et du ciel et dans le silence de l’Apprenti, n’est-ce pas le chemin que nous propose la colonne J ? Dans l’isolement du mutisme imposé, cette colonne d’airain et la colonne du nord sont comme un désert pour le nouveau Franc-Maçon. C’est là que s’éveille le désir d’un lieu dont on pressent l’existence, mais dont on ne connaît encore ni l’éloignement, ni la configuration. L’apprenti est en quête de cet ailleurs, de ce parcours initiatique qui le conduira au 4e pilier, dont l’absence riche de promesse, illuminera le désert intérieur traversé.
La voie contemplative qui dispose l’homme à se faire accueil et à écouter la transcendance, est aussi celle par laquelle il apprend à donner en apprenant à recevoir, celle où l’on sait que le centre est à l’extérieur et qu’au commencement est non pas le «Je» mais le «Tu».
Mais avant que le «Tu» ne prenne forme, au commencement de toute chose, au milieu et à la fin est le Son créateur. Source de Vie, il est un catalyseur qui éveille l’âme de l’homme qui comme une antenne, capte toutes les informations circulant entre le Macrocosme et le Microcosme. Il est un résumé de l’Univers et chacun de ses atomes exprime sa relation avec lui. Reflet du Cosmos et de ses forces, il est un des réceptacles de la Manifestation. Le Prâna, onde vitale qui traverse son corps, l’accompagne sur la voie de la Réalisation. Le Prâna ou Souffle cosmique investit la vie, il enveloppe toute la création, il est partout. L’Âme s’incarne et quitte le corps à travers lui.
Champ d’expérimentation et de transmutation, le corps humain est sacralisé par cette prise de conscience, alors seulement il devient véritablement notre Temple intérieur. Il est le creuset dans lequel s’opère la subtile alchimie de l’Âme. Comme rien n’est extérieur à lui-même, car il fait partie intégrante du tout, l’homme est invité à ouvrir sa conscience et à activer le lien qui le réunit au Cosmos tout entier. Comme l’écrivait Platon dans la République : « On est responsable de son choix, Dieu est innocent…».
C’est une approche qui complète une analyse au rite français. Elle va au-delà mais rapidement.