La Franc-maçonnerie à Malte au XVIIIe siècle -
La Franc-maçonnerie à Malte au XVIIIe siècle
Malte parait bien être une des plus anciennes terres d’implantation de la Franc-maçonnerie moderne après la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et la France. Le premier témoignage de l’existence d’une Loge dans l’île remonterait à 1730 avec un don que fit, peu avant le 14 février 1730, le Bailli du Brandebourg, Philip Guttenburg pour la construction d’une maison pour une Loge maçonnique à Msida. En 1740 l’inquisiteur Ludovico Gualtieri demande à Rome quelle position tenir envers les Francs-maçons. On lui rappelle la condamnation de 1738 par Clément XII et, sous la pression, le Grand Maître de l’Ordre, Raymond Despuig, publia la bulle In Eminenti… et expulse les chevaliers français de Livry et quelques-uns de ses amis pour appartenance à la Franc-maçonnerie. Despuig meurt le 15 janvier 1741 et Pinto da Fonceca qui lui succède, sacrifie quelques mois après, six autres chevaliers de l’île pour avoir participé à des réunions maçonniques, non par conviction mais pour obtenir une paix relative.
Les correspondances avec Rome montrent que se posait régulièrement aux autorités religieuses le cas de chevaliers Francs-maçons. Ainsi le 24 septembre 1757, le cardinal Corsini fait part à l’inquisiteur Salviati de ses soupçons quant à la qualité maçonnique des chevaliers Capons, Somma, Pinto, probablement un parent du Grand Maître, Serviene, Vaccene, Abela, Grilert, Micallef, Morelli et Wodworth.
Pendant une vingtaine d’années les incidents se multiplient qui attestent de la présence de la Franc-maçonnerie à Malte au sein de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Pressé par l’inquisition, le Grand Maître prend régulièrement des mesures de bannissement, contre les chevaliers Francs-maçons. En avril 1776, une enquête officielle sur la Franc-maçonnerie est menée sous la conduite de l’inquisiteur Antonio Lante. Les débuts des investigations se déroulent, dans un climat chargé, cinq mois après l’élection de Rohan. Aussi, en raison du caractère sensible du sujet, la procédure fut-elle conduite in camera, dans un relatif secret.
L’enquête embarrasse tout le monde… y compris l’inquisiteur qui a la surprise de découvrir trois de ses proches parmi les Frères des Loges ! Quant à Rohan, qui succéda à Pinto da Fonseca, il voit son nom cité à plusieurs reprises. Non seulement on fait allusion à la qualité maçonnique du Grand Maître, qui a été en effet initié en juillet 1756 dans une loge de Parme, mais en plus on cite avec insistance son parent le prince Camille de Rohan dont le palais à La Valette serait l’un des foyers maçonniques les plus actifs de Malte. On révèle aussi le nom de plusieurs chevaliers, surtout français. Finalement, à la suite d’une « regrettable » erreur de classement le rapport fut « égaré » et ne sera donc pas communiqué à Rome au siège de l’Inquisition. Il n’a été retrouvé qu’il y a trente ans dans les archives de la Cathédrale…